Engagement

Ressource #4 « Les attentes des jeunes vis-à-vis du travail après la pandémie » de Marie Baléo et Suzy Canivenc [Engagement]

Valérie Lourdel
Valérie Lourdel
Et Hannah Olivetti
Dans le cadre de l’exercice de prospective « Vers une société de l’engagement ? », la Fonda a souhaité ouvrir un espace de réflexions sur l’engagement : un club de lecture ! Dans cette quatrième fiche de lecture, Valérie Lourdel présente un working paper de Marie Baléo et Suzy Canivenc sur « Les attentes des jeunes vis-à-vis du travail après la pandémie ».
Ressource #4 « Les attentes des jeunes vis-à-vis du travail après la pandémie » de Marie Baléo et Suzy Canivenc [Engagement]
Visuel club de lecture ressource #4 © Agathe Thiebeaux / La Fonda

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Ressource #4 Marie Baléo et Suzy Canivenc (Chaire Futurs de l’industrie et du travail, Mines Paris Tech),« Les attentes des jeunes vis-à-vis du travail après la pandémie », mars 2022, 12 pages.

Fiche de lecture par Valérie Lourdel, administratrice de la Fonda.

Mots clés : #Engagement #EmploiESS

ENSEIGNEMENTS CLÉS

Brève présentation de l’auteur

Après plusieurs expériences en tant que responsable éditoriale au sein de think tanks, Marie Baléo a créé l’agence éditoriale Manifeste. Elle accompagne des entreprises, institutions et thinks tanks dans la conception et la mise en œuvre de leurs projets éditoriaux.

Suzy Canivenc, est quant à elle chercheure associée à la chaire Futurs de l’industrie et du travail. Ses travaux portent sur les innovations socio-organisationnelles en entreprise.

Que nous apprend cette ressource ?

Ce working paper est une synthèse mobilisant de nombreuses données d’enquêtes. Il permet de dépasser les sujets médiatisés comme le big quit ou le quiet quitting, tout en mettant en perspective la question du sens au travail, un terme-valise qui manque parfois de clarté.

Cet article remet aussi en avant, et c’est nécessaire, le fait que la jeunesse est plurielle, dans ses aspirations et comportements, comme les autres âges de la vie d’ailleurs.

Il donne aussi la mesure des évolutions à l’œuvre dans les attentes à l’égard de l’emploi et du travail chez les jeunes, mais pas seulement, et offre enfin des pistes de réflexions et actions pour les entreprises et les employeurs.

MISE EN PERSPECTIVE AVEC L’ENGAGEMENT

L’année 2020 a été marquée en France par une aggravation de la situation des jeunes vis-à-vis de l’emploi avec une hausse du taux de chômage des actifs de moins de 25 ans, des difficultés accrues d’insertion des jeunes diplômés et une hausse de la proportion des jeunes parmi les autoentrepreneurs.

La situation s’améliore néanmoins rapidement en 2021, notamment grâce aux mesures de soutien aux contrats d’apprentissage. Fin 2021 le taux de chômage des moins de 25 ans atteint son niveau le plus bas depuis 15 ans en France.

En parallèle, une autre tendance apparaît aux États-Unis à compter d’avril 2021 : the great resignation (ou grande démission). Chaque mois 4 millions d’Américains quittent leur poste, des jeunes, mais pas seulement.

En France, les difficultés de recrutement, qui préexistaient à la pandémie, semblent s’accroître et les ruptures de contrats de travail connaissent au 2e trimestre 2021 une hausse de 14 %. Il est toutefois difficile de dire si le big quit, synonyme de grande démission, la hausse des ruptures de contrat et les difficultés de recrutement relèvent d’un même phénomène.

Parmi les facteurs avancés :

  • le rejet des bullshit jobs que l’anthropologue David Graber avait identifié dès 2018,
  • une accélération des interrogations sur la place du travail dans les vies post- COVID-19 avec une volonté d’un meilleur équilibre vie professionnelle et vie personnelle, des réflexions sur le temps de travail et la semaine de 4 jours ou bien encore les missions qui ont du sens.

En parallèle les jeunes dans certains sondages n’affirment pas pour autant un rejet du travail, bien au contraire ils l’affirment comme une composante essentielle de leur vie.

Ces réalités coexistent, la jeunesse est plurielle, pour exemple, dans leur rapport au travail. En France, les jeunes diplômés des grandes métropoles sont au final plus proches de leurs homologues en Europe que des jeunes ruraux de leur pays.

La crise liée au COVID-19 a constitué un pivot concernant les attentes des jeunes à l’égard de l’emploi. Elle a accéléré des comportements et aspirations qui lui préexistaient. La quête de sens au travail affirmée par la majorité des jeunes avant le COVID-19 se renforce post-crise.

60 % des 18-24 ans seraient prêts à prendre un emploi moins rémunérateur, mais porteur de sens.

Dans l’article, les auteurs identifient les attentes des jeunes sur le contenu du travail. Être utile est le nouvel objectif des plus jeunes, ce qui concerne tout particulièrement les plus diplômés. Ainsi, 78 % des 18-24 ans n’accepteraient pas un travail qui n’a pas de sens pour eux. Ils sont en quête de sens dans des domaines qui leur tiennent à coeur comme l’environnement et la lutte contre les inégalités. Ils souhaitent par ailleurs que leurs missions professionnelles soient en phase avec leurs valeurs.

Ils veulent aussi s’épanouir dans leur travail. D’ailleurs, le « travail passion » est le premier critère de choix d’un poste pour cette classe d’âge. Plusieurs études montrent d’ailleurs que cette quête de sens serait surtout liée au niveau de diplôme des jeunes. Chez les moins de 27 ans, 58 % des bac +5 souhaitent par leur travail contribuer à résoudre les enjeux de société, contre 33 % des bac +2.

Les attentes des jeunes sur les engagements en matière de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) des entreprises sont par ailleurs examinées dans cet article. Ainsi, pour les 18-24 ans, l’entreprise idéale est celle qui s’implique dans les problématiques sociétales, à commencer par l’environnement (29 % des réponses), la lutte contre les discriminations (27 %) et la lutte contre les inégalités entre les femmes et les hommes (25 %). Les jeunes refusent les belles paroles et exigent des actes.

Quant aux attentes des jeunes sur les conditions de travail, les questions liées à la rémunération restent bien présentes, comme avant et comme chez les plus âgés. Les jeunes osent désormais réclamer haut et fort un équilibre vie professionnelle et vie personnelle, ainsi qu’une bonne ambiance de travail. Sur le plan managérial, les jeunes recherchent avant tout un environnement de travail épanouissant (33 %) et la reconnaissance du travail accompli (31 %).

Les valeurs les plus attractives que peut promouvoir une entreprise sont le respect (52 %), l’esprit d’équipe (31 %) et la bienveillance (31 %). Après les confinements successifs, les jeunes salariés travaillant dans des bureaux et vivant dans les grands centres urbains ont été les plus nombreux à réclamer de revenir au bureau. Pour 64 % des moins de 35 ans, « le bureau est un lieu de travail, mais également un lieu de vie où j’aime passer du temps ». Mais désormais, ils aspirent à un régime hybride et tout particulièrement encore en Île-de-France avec deux ou trois jours en télétravail.

Plus qu’au seul télétravail, les jeunes semblent aspirer à une flexibilité dans les manières de travailler, notamment concernant les horaires et les lieux. Après la pandémie, les jeunes semblent être encore plus attachés qu’auparavant aux occasions d’interactions sociales.

En conclusion, il semblerait qu’il existe une identité générationnelle autour du rapport au travail. Les conséquences n’en sont pas des moindres pour les employeurs. Pour attirer et fidéliser les jeunes, les entreprises devront proposer une expérience employé se traduisant par des actes concrets et prenant en compte la culture d’entreprise, l’expérience managériale et la recherche d’utilité sociale et d’impact positif.

Ressources pour aller plus loin

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Ce compte-rendu a été rédigé par Hannah Olivetti, relu par Anna Maheu et Valérie Lourdel pour la Fonda. Il est sous la Licence Creative Commons CC BY-NC-SA 3.0 FR.

Fiche de lecture