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La ferme Emmaüs de Baudonne, l’agroécologie pour accompagner les femmes en fin de détention [Initiative]

Tribune Fonda N°255 - Quand le sport contribue au bien commun - Septembre 2022
Emmaüs France
Et Hannah Olivetti
Gabi Mouesca a créé en 2018 une ferme agroécologique à Tarnos. Des femmes détenues s’y livrent à des activités de maraîchage, tout en stabilisant leur situation personnelle.
La ferme Emmaüs de Baudonne, l’agroécologie pour accompagner les femmes en fin de détention [Initiative]
Les serres de la Ferme Emmaüs de Baudonne © Emmaüs France

Les détenus, oubliées parmi les oubliés

Au 1er décembre 2021, 2 233 femmes étaient détenues, soit 3,2 % de la population carcérale. Lors de leur détention, elles ont un moindre accès au travail, à la formation, ainsi qu’aux soins.

Selon l’Observatoire international des prisons, elles sont aussi plus exposées aux ruptures des liens familiaux ou conjugaux durant l’incarcération1 .

Pour toutes ces raisons, leur réinsertion s’avère difficile. Des solutions existent pourtant, comme les fermes agroécologiques de réinsertion.

Finir sa peine dans une ferme agroécologique

Apparue dans l’Aisne en 1990, la première ferme agroécologique de Moyembrie permet aux détenus en fin de peine d’avoir une sortie de prison aménagée.

Le concept fait ses preuves : une convention est établie entre le ministère de la Justice et le mouvement Emmaüs pour créer d’ici 2023 une ferme agroécologique dans chacune des neuf régions pénitentiaires.

Les résidents participent au bon fonctionnement de la ferme via un Contrat à durée déterminée d’insertion (CDDI), tout en ayant du temps dédié pour stabiliser leur situation personnelle (démarches administratives, santé, logement, etc.).

La ferme de Tarnos pour les détenues

Ancien salarié d’Emmaüs France, Gabi Mouesca a présidé l’Observatoire international des prisons (OIP) de 2005 à 2009. En 2018, il crée une ferme agroécologique maraîchère accueillant des détenues, la première dédiée aux femmes. Après deux années et demie de travail, la ferme Emmaüs de Baudonne voit le jour.

La ferme accueille dix résidentes en simultané. Elles ont entre vingt et cinquante-cinq ans, viennent d’établissements pénitentiaires de toute la France. Rémunérées au Salaire minimum de croissance (SMIC), elles travaillent vingt-six heures par semaines sur une période allant de quatre mois à deux ans.

Pour Gabi Mouesca, «ce travail de la terre leur fait du bien, car il est structurant et bénéfique. Elles suivent l’évolution du cycle de vie de la plante, de la graine à l’assiette.» Elles sont accompagnées par une équipe de salariés, de bénévoles et de volontaires qui participent à la vie du lieu.

Un lieu pour prendre un nouveau départ

Ce sont les détenues qui demandent à intégrer la ferme pour leur fin de peine. Après une rencontre en visioconférence, puis à une permission de sortie à la ferme, elles peuvent demander au juge d’application des peines le placement en extérieur.

Cinq personnes sont sorties du dispositif, ce qui permet d’établir un premier bilan. Une s’est évadée. Les quatre autres « ont désormais un travail, ainsi qu’un logement dans le Sud-Ouest pour se relancer», précise Gabi Mouesca, désormais directeur de la ferme.

Depuis 18 mois, 15 femmes sont passées par la ferme Emmaüs de Baudonne. Ce lieu leur a permis de prendre un nouveau départ et augure une réinsertion durable.

  • 1Observatoire international des prisons, «Quelles sont les conditions de détention des femmes?», 3 février 2021 [en ligne].
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